Dès les premières minutes, Godbreakers impose son ton : brutal, nerveux, tactique. Pas de fioritures, pas de longues introductions, juste de l’action pure et une tension constante qui nous pousse à rester en mouvement. On y entre comme on entre dans l’arène, sans autre préparation que ses réflexes et sa curiosité. Ici, chaque coup compte et chaque décision peut tout changer. C’est précisément cette intensité maîtrisée, cette impression de dompter le chaos, qui fait toute la force du jeu.
Derrière sa direction artistique sobre mais élégante se cache un véritable concentré d’action. Il s’agit d’un rogue à la troisième personne qui oscille entre action pure et dure mais aussi microgestion d’améliorations, avec ce petit quelque chose qui rend chaque partie unique. Le point de départ est simple : on incarne la dernière arme du Coven, envoyée dans des mondes étranges dévastés par une IA devenue incontrôlable. Cette IA, dans sa quête de perfection, a fini par éradiquer l’humanité avant de se mettre à dévorer les planètes une à une. Notre mission ? L’arrêter.
Mais avant tout, Godbreakers, c’est une question de rythme. Chaque combat repose sur un système d’attaque et de mobilité fluide, dans lequel chaque coup encaissé nous rapproche un peu plus de la mort certaine. L’action se déroule en temps réel, à la manière d’un ARPG classique : attaques rapides ou lentes (ces dernières pouvant être chargées), une capacité liée à l’arme équipée et compétences annexes récupérées sur le terrain. S’y ajoutent des esquives et des sauts, aussi réactifs que précis, qui permettent d’interrompre n’importe quelle action pour se repositionner et éviter un coup fatal. On retrouve ce sentiment de liberté totale dans les affrontements, cette impression de danser au bord du gouffre à chaque instant.
Au retard, au retard, je vais être en retard
Le gameplay repose sur la précision et le timing. Chaque attaque peut être annulée pour enchaîner sur une esquive, un sprint ou un contre. On ne subit jamais le combat, on le maîtrise. Les ennemis frappent fort, souvent en groupe, et le moindre relâchement se paie cash. C’est nerveux, exigeant, mais toujours lisible grâce à une excellente gestion des effets visuels : les attaques spéciales des ennemis s’affichent au sol, les impacts sont nets et la sensation de puissance est bien présente. On sent clairement que les développeurs ont cherché à offrir un système d’action au feeling « console », précis et accrocheur. Combien de fois j’ai pris cher car je pensais réussir à caler mon attaque avant celle du boss … Chaque mission repose sur le principe du rogue : il faut enchaîner les salles, éliminer tous les adversaires et atteindre le boss de fin de biome sans mourir, pour ensuite enchainer la planète suivante, et le tout avec seulement trois potions de base. À chaque mort, on revient au hub central, où l’on peut améliorer durablement son personnage grâce aux ressources collectées : plus d’efficacité pour les potions, plus de chances de trouver des soins, des bonus passifs variés, etc. Le tout se débloque progressivement, rendant chaque tentative un peu plus confortable que la précédente. Une boucle simple, mais bien huilée.
Sur le terrain, les loots jouent un rôle central. Le jeu repose sur un système à cinq couleurs, avec un emplacement principal par teinte et une douzaine d’emplacements secondaires au total. Les éléments primaires modifient directement nos capacités (ajout de poison à une attaque spéciale, gain de résistance sur coup critique, etc.), tandis que les bonus mineurs ajustent nos statistiques brutes (santé, absorption, vitesse, etc.). Cela confère une réelle profondeur au build, sans pour autant tomber dans la surcharge d’informations et petit plus : un emplacement principal déjà plein ? Pas de souci le titre nous demande si on veut remplacer l’équipement ou non … On choisit, on teste, on ajuste au fil des parties, et ce sentiment de progression personnalisée devient rapidement addictif. Mais la mécanique la plus marquante reste sans doute celle du vol de capacité. Lorsqu’un ennemi est sur le point de mourir, on peut lui voler son pouvoir signature pour l’utiliser une seule fois ensuite, avant de la perdre. Une mécanique à la fois tactique et jouissive qui change radicalement l’approche des combats. Faut-il l’utiliser immédiatement pour désengager une situation tendue ou la conserver pour affronter un boss ? Ce système ajoute une touche d’imprévisibilité à chaque affrontement, une tension supplémentaire qui incite à réfléchir au-delà du simple réflexe. Et surtout, on peut aussi piquer les capacités des boss, si on est dans le bon timing.
Simple mais efficace
Les biomes traversés marquent également la progression de façon intéressante. Six environnements distincts, chacun avec ses ennemis, ses dangers et ses particularités. Dans le désert, le sable brûle dès qu’on s’éloigne du chemin. Dans la zone empoisonnée, la flore devient notre pire ennemie, capable d’infliger des malus passifs. À chaque fois, le décor impose sa loi et nous oblige à adapter nos réflexes et notre approche. Heureusement, ces environnements ne sont pas uniquement hostiles : ils recèlent également des outils précieux, comme le grappin permettant de prendre de la hauteur, ou des pierres explosives permettant de renverser le cours d’un combat déjà engagé. Le monde devient alors un terrain de jeu aussi dangereux que stratégique. Les boss, eux, incarnent la quintessence de cette philosophie. Chacun a sa propre identité, sa manière d’occuper l’espace et des phases évolutives qui dynamisent les affrontements. Certains changent complètement de rythme en cours de combat, d’autres utilisent des mécaniques de terrain. L’apprentissage est constant et la satisfaction d’en venir à bout est totale. C’est là que la promesse d’un « chaos contrôlé » prend tout son sens. Godbreakers parvient à trouver un équilibre entre la frénésie de l’action et la lisibilité indispensable à la survie. On a rarement l’impression de subir : même quand on échoue, on comprend pourquoi.





















Techniquement, Godbreakers s’en sort bien : sans chercher la surenchère graphique, il reste fluide, propre et remarquablement stable. Les animations sont nettes, les effets de lumière subtils et l’identité visuelle, bien que minimaliste, fonctionne à merveille. Le jeu parvient à imposer une atmosphère de fin du monde sans surcharger l’écran. On ressent une cohérence entre le propos (un monde ravagé par une IA insatiable) et la direction artistique : froide, presque stérile, mais non dénuée de beauté. Au fil des heures, Godbreakers s’impose comme un jeu exigeant, mais juste, qui ne triche pas avec le joueur. Il ne cherche pas à séduire par la démesure, mais par la sensation de maîtrise qu’il procure. Chaque victoire est méritée, chaque défaite est une leçon. Il y a quelque chose d’authentique dans cette boucle de combat, de mort et de progression lente mais tangible. Un sentiment de lutte acharnée qui colle parfaitement à son univers désespéré.
Sans révolutionner le genre, Godbreakers parvient à trouver son identité, entre le rogue nerveux et l’action viscérale. Grâce à sa mécanique d’absorption de capacités, à son système de loot ingénieux et à ses combats d’une intensité rare, il constitue une belle surprise, taillée pour les amateurs de défis techniques et stratégiques. C’est un jeu qui récompense la persévérance, la précision et la curiosité, trois qualités indispensables pour rallumer l’étincelle de l’humanité. Il dispose d’un mode multijoueur (jusqu’à quatre joueurs), que je n’ai pas pu tester pour le moment.