Obsidian revient avec The Outer Worlds 2, un RPG spatial toujours aussi mordant et fidèle à ses bases, quelques années après un premier opus satisfaisant. Direction Arcadia pour une toute nouvelle aventure entre complots, guerres de factions et liberté d’action, où la profondeur du jeu de rôle l’emporte sur la révolution technique.
Six ans après ce premier voyage où Obsidian nous prouvait qu’il était encore capable de manier le verbe et la satire aussi bien que la gâchette, The Outer Worlds 2 prend le relais sans pour autant chercher à faire table rase du passé. Le studio américain revient avec une suite qui assume son héritage, peaufine ce qui devait l’être et consolide les fondations de sa formule. Plus vaste, plus dense et un peu mieux rythmé, le titre conserve toutefois ce parfum de déjà-vu typique des productions Obsidian : solide, intelligent, mais rarement audacieux (ou pas autant qu’on l’aimerait).
On quitte cette fois les cieux d’Halcyon pour rejoindre la colonie d’Arcadia, un monde où tout part en vrille. Le Directoire terrien, ultime vestige d’une autorité centrale, tente désespérément de contenir des failles énergétiques capables de détruire la galaxie. Notre mission est simple : épauler l’agente De Vries et comprendre d’où viennent ces anomalies. Évidemment, rien ne se passe comme prévu : trahison, explosion, cryostase de dix longues années… Lorsque notre protagoniste émerge, tout a changé. Les corporations s’affrontent, le Protectorat joue les garants de la paix à coups de bottes militaires, et la fameuse De Vries, qu’on croyait morte, refait surface dans un jeu de dupes bien plus vaste que prévu. Ce n’est pas seulement une enquête que l’on mène, mais un enchevêtrement de luttes de pouvoir dont chaque décision influence le dénouement. Fidèle à sa philosophie, Obsidian place le joueur au centre du récit : rien n’est jamais totalement blanc ni noir, et la moindre réponse peut peser sur l’avenir d’Arcadia.

Un gout de « revenez y »
Si la structure générale reste familière, The Outer Worlds 2 soigne son entrée. La première heure, dense et maîtrisée, sert à la fois de didacticiel et de tremplin narratif. Tout y est pensé pour que chaque choix, qu’il s’agisse d’un trait de caractère, d’une compétence ou d’une répartie bien sentie, ait un impact concret. On retrouve ce sens du “jeu de rôle à jouer”, celui qui permet d’incarner un commandant impétueux, rusé ou complètement désabusé selon les options retenues. Les dialogues, toujours aussi bien écrits et délicieusement acides, tirent parti des forces et faiblesses de notre personnage pour ouvrir des chemins inattendus. C’est là tout le savoir-faire d’Obsidian : faire rire sans désamorcer la gravité du propos, et rappeler qu’un bon RPG ne se résume pas à des statistiques.
Sur le plan des mécaniques, la suite joue la carte de la continuité. Le gameplay reste globalement calqué sur le premier épisode, avec sa vue à la première personne, sa gestion classique de l’inventaire et ses dialogues à embranchements multiples. Deux nouvelles caméras à la troisième personne, l’une rapprochée et l’autre en plan plus large, font leur apparition, une idée séduisante sur le papier mais encore un peu rigide dans l’exécution. Les animations sont parfois raides, les déplacements manquent de souplesse et les interactions à cette vue ont tendance à perdre en précision. On sent la bonne intention, celle d’offrir une alternative aux réfractaires du FPS pur, mais l’ensemble reste un peu bancal.

Côté combat, Obsidian a fait le ménage. Les affrontements gagnent en nervosité, la mobilité est accrue et les sensations d’armes sont plus convaincantes qu’en 2019. Le fameux système de “dilatation temporelle” fait son retour, toujours aussi pratique pour ajuster un tir ou esquiver une rafale ennemie. La panoplie d’armes est variée, avec ce grain de folie qui caractérise la série, même si le shoot manque encore parfois de punch. Les ennemis se mettent à couvert, lancent des grenades, réagissent aux bruits et punissent les erreurs selon la difficulté choisie. Les amateurs d’infiltration pourront désormais tenter des approches plus subtiles grâce à un vrai système de détection et d’attaques furtives. Ce n’est pas encore du Deus Ex non plus, mais ca semble plus engageant que par le passé. Ayant joué un salopard résolvant chaque problème par la violence, je ne pourrais confirmer et me base donc sur mon impression du début du jeu sur ce point néanmoins.
Du RPG, pur et dur
L’évolution du personnage conserve sa formule RPG classique mais efficace. Chaque montée de niveau offre ses points de compétence à répartir entre les grandes catégories (armes, science, piratage, persuasion, etc) avec, en prime, des avantages plus spécifiques à débloquer tous les deux niveaux. Ces perks, parfois assortis de malus, façonnent réellement la façon de jouer : un tireur d’élite verra ses dégâts augmentés sur longue distance mais sera nerfé en combat rapproché, tandis qu’un marchand retors profitera de meilleurs prix sur les articles volés mais avec aussi une potentielle contre partie. Enfin, par moments, il arrivent que durant du gameplay, le titre nous ouvre une opportunité de gagner un trait assez avantageux, mais là aussi avec une grosse compensation à mettre dans la balance (un meilleur soin, de 25% amélioré, mais un empoisonnement plus rapide aussi par exemple). Les compagnons progressent à leur rythme, débloquant de nouvelles aptitudes tous les cinq niveaux. Comme dans le premier épisode, ils ne sont pas de simples suiveurs mais de véritables extensions de nos choix moraux et tactiques. Chacun dispose de sa personnalité, de ses motivations et de ses quêtes propres, ce qui renforce encore l’immersion dans ce monde fracturé.

On retrouve également les conséquences à long terme. Chaque décision, chaque geste influe sur la perception que les factions ont de nous. Être loyal envers le Protectorat, jouer double jeu avec Auntie’s Choice ou trahir les uns pour sauver les autres : tout est permis, mais jamais sans prix à payer. Le système de réputation reste un pilier de l’expérience, encourageant le joueur à réfléchir avant d’agir ou à assumer ses écarts. On sent bien la volonté d’Obsidian d’élargir le spectre moral sans tomber dans la caricature. Arcadia, plus qu’un décor, devient un véritable échiquier politique.
Sur le plan du contenu, The Outer Worlds 2 ne trahit pas ses origines : le jeu fourmille de missions annexes, souvent découvertes par hasard au fil des dialogues, sans le moindre marqueur sur la tête des PNJ. Le studio conserve cette philosophie de la découverte organique, où le joueur doit prêter attention à ce qu’il entend, lire les messages sur les terminaux et explorer plutôt que suivre un GPS. C’est dans ces moments que le jeu respire le plus, offrant des tranches d’exploration et d’enquête d’une vraie richesse. On regrette seulement que certaines quêtes secondaires se contentent encore de schémas assez classiques, mais la qualité d’écriture rattrape souvent cette impression de déjà-vu, tout comme certains pans du monde vides de vie. Entre les caches à trouver, les trésors cachés, les terminaux regorgeant d’éléments de lore, et j’en passe, il faut plusieurs dizaines d’heures pour en voir le bout.

L’UE 5, poison du monde pc
Techniquement, Obsidian a pas mal appuyé sa communication sur les technologies embarquées : ray tracing, supersampling, HDR, etc. Sous Unreal Engine 5, The Outer Worlds 2 affiche une direction artistique plutôt sympa, mêlant néons, architectures rétrofuturistes et décors industriels fracturés. La patte visuelle d’Obsidian reste unique. En revanche, inutile d’espérer une claque graphique : les textures sont propres mais sans plus, et certaines animations trahissent un moteur pas toujours à l’aise ni maîtrisé (les temps sont durs pour l’UE5…). Sur PC, le jeu peut se montrer étonnamment gourmand, trop même. En 4K avec ray tracing, les performances chutent régulièrement autour des 40 fps, malgré le supersampling et le framegen activés mettant ma 4070 Ti Super à genoux.
Désactiver le RT permet de dépasser les 60 fps mais sans aller trop haut (malgré DLSS + FG). En 1440p et sans ray tracing, la situation s’améliore grandement, dépassant les 100 fps mais là aussi, avec DLSS et FG tout de même. À la vue de son rendu, d’un point de vue technique brut, difficile de comprendre que notre configuration soit mise à mal pour un tel résultat, surtout avec le framegen activé. Et c’est un souci rencontré sur énormément de titres UE5, pliant souvent des configurations surdimensionnés pour un rendu pas toujours à la pointe. Espérons des patchs rapidement pour affiner un peu tout cela. Avec framegen, en 4K sous DLSS, le 60fps devrait être une formalité.
La bande-son, quant à elle, reste discrète mais efficace. Les doublages anglais sont d’excellente facture, avec des sous-titres français soignés. Les musiques accompagnent sans étouffer, alternant nappes synthétiques et orchestrations plus tendues lors des combats. On aurait peut-être aimé davantage de thématiques marquantes, mais l’ensemble soutient bien l’immersion.
The Outer Worlds 2 ne révolutionne rien, et c’est peut-être sa plus grande qualité. Obsidian ne cherche pas à réinventer sa formule, mais à la perfectionner. Le jeu se veut plus abouti, plus cohérent, mieux équilibré. Les choix narratifs gagnent en épaisseur, les affrontements en intensité, la progression en clarté. Le studio semble avoir tiré les leçons du premier opus : moins d’esbroufe, plus de maîtrise. Et même si la technique reste un peu à la traîne, le plaisir de jeu, lui, ne faiblit pas. Arcadia n’a peut-être pas la folie de la découverte d’Halcyon, mais elle en a la maturité.
Dix ans après notre première escapade dans les étoiles, Obsidian signe une suite qui ne cherche pas à épater la galerie, mais à offrir un RPG solide, sincère et intelligemment écrit. Sans atteindre le niveau d’ambition d’un Starfield ou la démesure d’un Mass Effect, The Outer Worlds 2 s’impose comme un retour aux sources du jeu de rôle narratif : celui où chaque choix, chaque faiblesse, chaque maladresse fait partie de l’histoire. Un space opera à taille humaine, plein de personnalité, qui prouve qu’on peut viser les étoiles sans forcément vouloir redessiner la galaxie. Une belle évolution, ni plus ni moins. Par contre, carton « rouge » pour les performances et l’optimisation, sûrement liées à l’UE5.