Deux ans après la sortie de son excellent TRPG Lost Eidolons, le studio Ocean Drive a surpris tout le monde en lançant son spin-off, Veil of the Witch, en accès anticipé. On y retrouve les bases du gameplay de l’offre originale, mais avec une touche roguelike. Une recette efficace, classique dans le fond, mais bien ficelée dans la forme. Après presque un an, la version 1.0 est enfin disponible, offrant une expérience complète et addictive. Veil of the Witch combine avec brio tactical RPG et roguelike pour un voyage détonant.
L’action se déroule dans un univers médiéval fantasy où une guerre sanglante éclate et sème la mort partout. On y retrouve des thèmes classiques tels que la rébellion, les luttes de pouvoir et la corruption, à la manière de Game of Thrones. Eden, un jeune soldat, devient au fil du temps le symbole de la résistance face à l’oppression. Veil of the Witch se déroule dans le même monde et à la même époque que Lost Eidolons, mais raconte une histoire totalement indépendante de la trame principale. On y incarne un tout nouveau héros amnésique, échoué sur une île reculée acculée par une armée de morts. Une mystérieuse sorcière, Sable, nous prend sous son aile et nous aide dans notre quête aux multiples enjeux : retrouver la mémoire, comprendre pourquoi nous nous dirigions vers cette île et quelle est l’origine de cette invasion macabre, et découvrir qui tire les ficelles.
Le gameplay est similaire à celui de Lost Eidolons : il s’agit d’un jeu de rôle tactique au tour par tour dans lequel deux camps s’opposent sur une carte composée d’un damier classique, avec une gestion des capacités de déplacement et de portée des attaques et des compétences. Le système de double arme du jeu d’origine est conservé, ce qui permet à nos unités d’avoir une certaine polyvalence et de s’adapter à la situation du moment, avec un sous-système de résistance/force/faiblesse : l’armure lourde est plus sensible à la hallebarde qu’à l’épée simple, et ainsi de suite. À cela s’ajoutent l’importance du placement et la direction d’où viennent les attaques, ainsi que les temps de recharge des talents spéciaux. La topologie du terrain est également un élément majeur à prendre en compte, avec des obstacles qui servent de couverture pour casser les lignes de vue ou limiter les déplacements. Il ne faut pas non plus oublier que la nature influe sur notre capacité à encaisser les dégâts. Une cible trempée est idéale pour un mage spécialisé dans l’électricité, mais elle résiste aux sorts de feu du fait de ce status temporaire. Bref, le panel classique du jeu de stratégie tactique, revisité à la sauce Lost Eidolons. C’est puissant, tactique et addictif ; on y retrouve l’essence même qu’Ocean Drive avait créée pour son premier titre. La narration est bien rythmée et bien ficelée, avec quelques surprises au programme. Le programme s’annonce XXL.
















La couche roguelike modifie tout le reste, à commencer par l’aspect survie de nos troupes. Si une unité périt durant un combat, elle revient certes dans le groupe par la suite, mais affaiblie, et avec un gain de statistiques mineur (vis à vis des survivants) en récompense de notre victoire, ce qui forcément a un impact sur le reste de l’aventure, le run en cours. Nos unités accumulent de l’expérience à chaque acte, et lorsqu’elles gagnent un niveau, on peut choisir entre plusieurs bonus de rareté différente. On peut ainsi spécialiser notre unité dans un rôle de plus en plus précis afin de maximiser son efficacité, ou rester sur une polyvalence « bon nulle part, moyen partout ». Par exemple, Evie est un mage de soutien qui dispose également d’un arc. À chaque niveau, on améliore ses capacités de soin ou ses talents d’archerie. Chaque choix fait pencher la balance de l’équilibrage de notre équipe globale, ce qui n’est pas anodin. Il faut peser le pour et le contre à chaque fois, et toujours penser globalement.
Concernant la progression, on retrouve un système typique des roguelikes, illustré par notre escouade qui progresse dans l’un des nombreux décors du jeu (une montagne enneigée, une plaine marécageuse ou désertique), où plusieurs chemins se dévoilent dans ce paysage labyrinthique. Chaque route débouche sur un combat et une récompense spécifique (de l’or, des pierres runiques, des braises de feu, etc.) ou sur un camp où l’on peut se reposer et reprendre des forces. Le chemin vers la victoire est long et difficile. Ces différentes ressources permettent de se donner un coup de pouce le temps d’une partie. L’or est dépensé chez les marchands pour acquérir des reliques qui confèrent divers bonus. Les pierres runiques améliorent la rareté d’une pièce d’équipement, tandis que les braises sont dépensées pour booster l’un des arbres de compétences disponibles à l’autel de feu (attaque, défense ou bonus passif). Il y a également quelques pièces d’équipement dans le lot, ainsi que des accessoires qui apportent encore leur lot de boost, de bonus et d’améliorations. Perdre toute son escouade est synonyme d’échec et de retour à la case départ. Mais grâce à ces braises de feu, tout n’est jamais perdu et l’escouade gagne en puissance au fil du temps. Le reste est réinitialisé (niveau, rareté de l’équipement, relique, etc.). Recommencer un périple aussi long est parfois rageant, surtout quand on touche presque au but, mais on ne repart pas de zéro : on revient plus fort, mieux préparé, et quand la victoire arrive enfin, la satisfaction est grande.
La direction artistique change également, avec un rendu plus proche de la bande dessinée, et surtout l’abandon total des cinématiques, remplacées par des cutscènes au format visual novel. Cette nouvelle approche est une réussite, et surtout, son style, peu gourmand en ressources, lui permet de tourner en paramètres maximaux sur tout type de machine, y compris sur le Steam Deck, qui affiche un framerate oscillant entre 120 et 150 fps. Sur console, c’est tout pareil, avec un build optimisé et une version propre et soignée.
Lost Eidolons : Veil of the Witch allie à merveille les mondes du TRPG et du roguelike, en mêlant des mécaniques connues et éprouvées de deux genres différents, mais parfaitement imbriquées les unes avec les autres. Enchaîner les boss et atteindre le but est difficile et exigeant, mais pas punitif pour autant. Chaque combat nécessite d’analyser la situation et d’agir de façon réfléchie. Les adeptes du « fonce tête baissée » vont le sentir passer : il est utile d’analyser la situation et d’agir en conséquence, d’autant qu’on est toujours en infériorité numérique. Il en va de même pour améliorer un membre de notre troupe. Même principe : analyse et réflexion pour déterminer ce qui est le mieux pour notre escouade, et pas uniquement à court terme. La formule fonctionne, la narration nous séduit, les mécaniques de gameplay sont toujours aussi bonnes ; l’ensemble me paraît donc être une bonne pioche. Vous êtes fan de tactical ? L’aspect rogue ne vous déplaît pas ? Lost Eidolons : Veil of the Witch coche donc toutes les cases.